Contrôle des MSD : de la conformité à l’excellence opérationnelle pour la fabrication électronique

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L’humidité, un risque invisible dans la production CMS

En fabrication de cartes électroniques, certains composants sont sensibles à l’humidité ambiante (MSD). Exposés trop longtemps avant montage, ces composants peuvent absorber de l’humidité, ce qui constitue un risque majeur lorsqu’ils sont soumis aux températures élevées des procédés de refusion ou de soudure.

L’élévation brutale de température entraîne alors une vaporisation rapide de l’humidité interne, générant une pression pouvant provoquer des délaminations internes, des boursouflures visibles, des fissures ou, pire encore, des défauts latents. Ces derniers passent généralement inaperçus aux tests AOI ou ICT, mais provoquent des pannes sur le terrain, avec des conséquences potentiellement critiques dans les secteurs médicaux, aéronautiques ou automobiles.

Pourquoi les composants MSD sont vulnérables

Le comportement des MSD (Moisture Sensitive Devices) dépend de plusieurs variables physiques et environnementales :

  • L’humidité relative : Plus l’air est humide, plus le composant absorbe rapidement l’humidité.
  • La température ambiante : Une température plus élevée accélère encore ce phénomène d’absorption.
  • La perméabilité de l’emballage : Certains plastiques sont plus poreux que d’autres, laissant passer plus facilement la vapeur d’eau.
  • L’épaisseur du boîtier : Plus un composant est épais, plus il peut absorber de l’humidité avant d’atteindre un niveau critique.
  • Le type de packaging : Les BGA ou matrices empilées sont naturellement plus sensibles en raison de leur structure.

Avec la miniaturisation croissante des composants, les défis augmentent : les boîtiers sont plus fins, les tolérances mécaniques plus faibles, et les dommages internes plus difficiles à détecter. La combinaison de ces facteurs impose une approche rigoureuse et automatisée pour maîtriser ce risque.

Normes IPC/JEDEC : comprendre le MSL et la durée de vie au sol

Les normes J-STD-020F et J-STD-033D ont introduit la notion de MSL (Moisture Sensitivity Level). Chaque composant est classé selon un niveau de sensibilité allant de 1 (peu sensible) à 6 (très sensible), avec une durée de vie au sol (floor life) maximale à 30°C / 60 % HR.

Mais dans la réalité, d’autres variables doivent être prises en compte pour calculer cette durée de vie, comme l’humidité réelle, la température ambiante, le type de boîtier et son épaisseur. La norme J-STD-033D propose ainsi un tableau croisé de 600 combinaisons possibles pour estimer la durée de vie restante d’un composant.

Ce niveau de complexité rend toute gestion manuelle (tableurs, papier) non viable à l’échelle d’un atelier de production.

Différence fondamentale entre les 2 normes :

Le J-STD-020F est une norme de classification qui établit comment évaluer la sensibilité à l’humidité des SMD et leur attribuer un niveau (MSL). C’est une norme de test.

Le J-STD-033D est une norme de gestion et de manipulation qui indique comment interagir avec les SMD une fois leur MSL déterminé par le J-STD-020F. C’est une norme opérationnelle qui fournit les directives pratiques (emballage, séchage, stockage, durée de vie en ambiance, étiquetage) pour prévenir les dommages liés à l’humidité. Ces deux normes sont donc complémentaires : le J-STD-020F fournit l’information sur le niveau de risque, et le J-STD-033D fournit les mesures à prendre pour gérer ce risque.

Vers une gestion complète et automatisée des MSD

La mise en œuvre efficace d’un contrôle MSD nécessite bien plus qu’un simple étiquetage ou une cuisson ponctuelle. Cela implique :

1. Identification unique et traçabilité complète

Chaque unité de stockage (bobine, tube, plateau) doit être associée à un identifiant unique. Celui-ci ne se limite pas au numéro de lot ou au MSL : il doit également intégrer des informations comme l’épaisseur du composant, son type de boîtier ou les données de stockage initiales. Ces informations sont indispensables pour appliquer correctement les règles de gestion (durée de vie restante, cycles de cuisson, blocages).

Un étiquetage code-barres permet ensuite de suivre chaque mouvement du composant dans l’usine (réception, stockage, ligne de production, cuisson).

2. Un stockage intelligent et connecté

Deux types de stockage sont à considérer :

  • Les tours de stockage automatisées permettent une gestion dynamique des composants tout en limitant leur exposition. Elles améliorent le picking, la préparation de kits, et permettent une intégration directe avec les logiciels de gestion de production. Cependant, elles ne peuvent pas détecter l’état des composants une fois ceux-ci en ligne.
  • Les armoires sèches permettent de ralentir ou d’interrompre l’horloge d’exposition, mais uniquement pour certains niveaux MSL (notamment 2, 2A et 3). Les composants plus sensibles nécessitent un cycle de cuisson pour remettre l’horloge à zéro.

Une gestion automatisée des entrées/sorties (scan in/out) et des conditions d’ambiance est essentielle pour fiabiliser les calculs de durée de vie.

3. Suivi en temps réel et alertes de production

À mesure que les composants approchent de leur durée limite, un bon système doit :

  • Afficher des alertes graduées : par exemple à H-1, H-0h30, puis à expiration.
  • Bloquer les machines de placement si un composant non conforme est détecté.
  • Assurer la conformité sur les deux faces d’un PCB, surtout dans les montages double face où le composant posé côté A peut expirer avant la pose du côté B.

Ce suivi inclut aussi les PCB nus, qui peuvent être eux-mêmes sensibles à l’humidité, bien que non couverts par une norme MSL officielle. Le système doit permettre de leur appliquer des règles spécifiques, notamment en matière de stockage et de cuisson.

4. Une gestion fiable de la cuisson

La cuisson est le seul moyen de remettre à zéro l’horloge d’un composant ayant dépassé sa durée de vie au sol. Cette étape doit respecter les températures et durées définies par les normes, en fonction du type de composant :

  • 40°C : peu agressif, mais très lent (parfois >7 jours),
  • 90°C : standard rapide pour la majorité des composants,
  • 125°C : réservé à des composants robustes ou à des cas spécifiques.

Une cuisson à 60°C est parfois utilisée comme compromis, bien qu’elle ne soit pas officiellement normée. Elle peut être efficace si les temps sont correctement recalculés, mais doit rester sous contrôle strict.

Le contrôle des composants sensibles à l’humidité ne se limite plus à éviter les effets « popcorn ». Il s’agit désormais d’un enjeu de traçabilité, de qualité produit et de conformité aux exigences clients. Pour y répondre efficacement, il faut s’appuyer sur un système centralisé, interconnecté, capable de suivre les composants et les PCB tout au long de leur cycle de vie.

Une gestion automatisée des MSD permet de gagner en sérénité, d’éviter les défauts invisibles, et d’optimiser les ressources sans compromis sur la qualité. L’heure n’est plus à la surveillance manuelle : place à l’intelligence système.